Cybersécurité : l’Europe doit-elle exclure Huawei de ses infrastructures solaires ?

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Après le gaz russe, l’Europe risque-t-elle d’être de nouveau trop dépendante d’une puissance étrangère pour ses besoins énergétiques ? Selon le média Politico, la réponse est oui. Mais il ne s’agit pas de gaz, ni de carburant. Le problème se trouve directement au niveau de la production d’électricité, et plus spécifiquement le solaire.

La Chine fabrique la majorité des panneaux solaires, mais ce n’est pas le vrai problème. Il serait facile de croire qu’il est impossible que la Chine coupe l’énergie solaire de l’Europe, comme c’était le risque avant avec le gaz russe. Mais en théorie, ce serait pourtant tout à fait possible. La menace provient d’un petit boîtier, l’onduleur, qui convertit le courant continu produit par les panneaux en courant alternatif.

Ces petits boîtiers peuvent sembler inoffensifs, mais ils sont connectés à Internet pour permettre de surveiller leur fonctionnement et les mettre à jour. Ils offrent, par conséquent, une porte d’accès à distance potentiellement exploitable. La quasi-totalité de ces onduleurs sont fabriqués en Chine, avant tout par Huawei.

Des appareils de communication dissimulés

En mai dernier, certains spécialistes aux États-Unis avaient découvert des appareils de communication cachés dans les onduleurs, selon Reuters. Cela leur permettrait de contourner tout blocage mis en place pour communiquer avec la Chine. Cela inquiète bien entendu les experts de la cybersécurité et les responsables européens.

Deux membres du parlement européen, le Néerlandais Bart Groothuis et la Slovaque Miriam Lexmann ont écrit une lettre pour avertir la Commission européenne des risques. « Nous vous exhortons à proposer des mesures immédiates et contraignantes afin d’empêcher les fournisseurs à haut risque d’accéder à nos infrastructures critiques », ont-ils écrit.

Les entreprises chinoises contrôlent 65 % de la puissance solaire installée, et la plus grande entreprise dans ce secteur en Europe est Huawei. L’un des plus grands lobbies de l’énergie renouvelable, SolarPower Europe, qui représente plus de 300 entreprises, avait exclu Huawei en mai dernier. Toutefois, il y a deux semaines, l’association a suspendu la procédure d’exclusion, réintégrant de fait Huawei.

Six fabricants chinois pourraient perturber le réseau électrique européen

Selon les spécialistes, il suffirait de compromettre des onduleurs gérant 3 GW pour créer des surcharges ou des chutes de tension suffisantes pour perturber l’ensemble du réseau électrique européen. À titre de comparaison, les équipements de Huawei sur le continent représentent une production de 114 GW, et cinq autres entreprises chinoises dépasseraient 5 GW. Des entreprises soumises à la loi chinoise sur le renseignement national qui les oblige à coopérer avec les services de renseignement du gouvernement…

Heureusement, l’Europe commence à réagir. La Lituanie a interdit l’accès à distance par les entreprises chinoises pour les installations dépassant 100 kilowatts, interdisant ainsi les onduleurs chinois. L’ESMC (European Solar Manufacturing Council) plaide pour l’adoption rapide d’une approche coordonnée inspirée de la boîte à outils européenne de sécurité 5G.

Toutefois, cela aura un coût. Les onduleurs chinois sont 30 à 50 % moins chers que ceux fabriqués en Europe, et il faudra construire une filière européenne sécurisée pour répondre à la demande du continent entier. Cela pourrait faire flamber le coût des panneaux solaires et retarder la transition écologique…

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