L’évolution phénoménale de l’intelligence artificielle ces trois dernières années, depuis la sortie de ChatGPT, a changé notre manière d’aborder le monde numérique. Les chatbots peuvent désormais vous assister avec la plupart des tâches en ligne. Cela modifie aussi notre manière de travailler, avec de plus en plus de tâches ingrates et répétitives confiées à l’IA. La crainte est qu’elle finisse par nous remplacer complètement, et qu’une bonne partie de l’humanité se retrouve au chômage.
Un impact avant tout limité aux jeunes diplômés
L’actualité semble donner raison. De nombreuses grandes entreprises licencient en masse tout en blâmant l’IA. Mais très souvent, ce n’est qu’un prétexte. Une étude récente de l’université de Yale a montré qu’au contraire, l’IA n’a pas encore eu d’effet significatif sur l’emploi aux États-Unis. Les effets constatés relèveraient plutôt d’un ralentissement du marché du travail, lié au contexte économique actuel.
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Une étude du King’s College London a montré que si le nombre de postes pour les jeunes diplômés avait bien baissé, l’impact est surtout cantonné aux entreprises qui avaient les salaires les plus élevés. À terme, ces entreprises risquent d’avoir des difficultés de recrutement pour des postes nécessitant plus d’expérience.
Les capacités des IA surévaluées
Toutefois, l’IA n’est pas aussi compétente que certains voudraient nous faire croire. Tous les grands modèles de langage (LLM) sont sujets aux hallucinations. Une étude publiée plus tôt cette année a montré un taux d’erreur de 60 % lorsque les chatbots sont utilisés pour la recherche sur le Web. De plus en plus de spécialistes considèrent que l’architecture des modèles actuels ne leur permettra pas de rivaliser avec l’intelligence humaine et atteindre l’intelligence artificielle générale ou la superintelligence.
Yann LeCun, l’un des pères de l’IA moderne, a même récemment quitté Meta pour travailler sur un autre type de modèle baptisé Jepa. Il faudra peut-être encore de nombreuses années, ou des décennies, avant que l’IA soit réellement capable de faire le travail des humains.
Yann LeCun détaille sa vision de l’intelligence artificielle qu’il considère ne va pas remplacer l’intelligence humaine. © Université de Genève
Une évolution de l’emploi, plutôt qu’un grand remplacement
Quand bien même l’IA serait capable de nous remplacer tous, chaque bouleversement technologique a toujours apporté de nouveaux métiers. Il y a 20 ans, peu de gens auraient imaginé que les activités de youtubeur ou d’influenceur auraient pu permettre de gagner sa vie, et encore moins de devenir riche. Nous avons déjà de nouveaux métiers, comme prompt engineer (ou ingénieur d’invite). Même si ce dernier risque de devenir obsolète aussi rapidement qu’il n’est apparu, il faudra sans doute toujours des spécialistes pour guider l’IA. Comme tout outil, des experts connaîtront toutes ses subtilités et sauront le manier afin d’obtenir les meilleurs résultats.
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Dans le pire des cas, le cas peu probable où tous les postes disparaissent, cela fait déjà un certain nombre d’années que des discussions ont lieu autour du revenu universel de base, un montant versé par le gouvernement sans conditions de ressources. Certains pays ont même déjà mené des expériences, comme en Finlande ou en Allemagne, et montrent un effet positif sur l’emploi et le bien-être. L’impact de l’intelligence artificielle dépendra donc principalement de nos choix politiques, économiques et sociaux.