Avec ce moteur révolutionnaire, le ConcordeConcorde aurait eu 61 % d’autonomie supplémentaire ! C’est ce que prétend la start-up américaine Astro Mechanica en présentant son moteur turboélectrique adaptatif. La société vient de réaliser avec succès le premier test de son moteur baptisé Gen3. Il a été poussé jusqu’à 30 % de sa puissance maximale. Cette toute petite entreprise, fondée en 2021 aux États-Unis, combine la technologie des moteurs de véhicules électriques avec celles des turboréacteursturboréacteurs. L’engin est adaptatif, c’est-à-dire qu’il est optimisé pour chaque phase de vol, que ce soit en mode subsonique ou supersonique.
Pour cerner l’atout de ce moteur turboélectrique, il est nécessaire de comprendre comment fonctionne un turboréacteur traditionnel et sa variante à double flux. Un turboréacteur aspire de l’airair en utilisant ses propres gazgaz d’échappement pour faire tourner la soufflante du compresseur. Plus il y a de gaz d’échappement et plus la vitessevitesse est importante. De fait, le turboréacteur est très performant à des vitesses supersoniques, mais peu en subsonique. Dans cette configuration, la consommation en carburant est alors énorme. Ainsi, le Concorde consommait deux tonnes de carburant uniquement pour son roulage du taxiway à la piste de décollage. C’est ce genre de réacteur qui équipe les avions de chasse. Ils ne sont conçus ni pour la sobriété écologique ni pour la discrétion.
Un turbogénérateur fournit l’énergie à des moteurs électriques qui alimentent le compresseur et le turboréacteur. © Astro Mechanica
Le meilleur des deux mondes
L’autre variante que l’on trouve sur l’ensemble des avions de ligne est le turboréacteur à double flux. La poussée est réalisée à la fois par les gaz de combustioncombustion, mais aussi par un flux d’air froid. L’air qui entre est réparti en deux flux, avec autant de parcours dans le moteur. Ils se rejoignent en sortie de tuyèretuyère. Une partie de l’air prend le chemin du turboréacteur classique, quand l’autre passe en périphérie du moteur. L’air froid vient envelopper le flux d’échappement. Ce premier est même plus performant en poussée dans certaines conditions. Les économies en carburant sont importantes et le bruit moins conséquent.
En revanche, si ce procédé est très efficace à des vitesses subsoniques, le passage du mur du sonmur du son reste problématique. Pour avaler un maximum d’air, les soufflantes sont énormes et cela engendre une traînée aérodynamique qui rend le vol à cette allure difficile et contreproductif.
Plus petit, le premier prototype de moteur Gen1 avait pu atteindre une vitesse impressionnante de Mach 3. © Astro Mechanica
Plus performant, moins onéreux
La solution d’Astro Mechanica vient mixer le meilleur des deux mondes avec des motorisations électriques. L’engin est à la fois un turboréacteur classique et à double flux. Il peut passer d’un mode à l’autre selon la vitesse. Mieux encore, au lieu d’être alimenté par les gaz d’échappement, le compresseur est animé par un ensemble de moteurs électriques. Ils sont alimentés par un autre moteur entraîné par un turbogénérateur indépendant du réacteur. Autrement dit, la soufflante est séparée du compresseur. Avec cette dissociation, le procédé permet de faire varier la quantité d’air comprimé pour la combustion. D’où le côté adaptatif, car l’ensemble adapte le débit d’air à la vitesse du vol.
Plus précisément, le moteur turboélectrique adaptatif est doté de trois modes. Le premier exploite un moteur électrique pour faire tourner le disque à aubeaube qui sert de compresseur/turbofan. Il n’y a pas de combustion du flux d’air. De quoi réduire considérablement la consommation de pétrolepétrole lors du roulage et en vol subsonique. Le second mode, fait passer le moteur en turboréacteur simple pour passer en vol supersonique. Là aussi, un moteur électrique alimente en air le compresseur, plutôt que d’exploiter les gaz d’échappement. Le troisième mode est encore plus impressionnant, puisqu’il transforme l’ensemble en statoréacteur pour aller au-delà de Mach 3. De quoi ouvrir au moteur la porteporte à l’aventure spatiale. Dans ce mode, il n’y a plus besoin d’éléments mobilesmobiles, c’est la vitesse seule de l’avion qui fournit la compression pour la combustion.
Avec cette architecture, la société affirme que ce réacteur sera bien moins onéreux qu’un Leap-1B d’avion de ligne, par exemple. L’entretien serait également moins important car il y a moins de pièces mobiles. Autre atout, l’engin peut être alimenté par du GNLGNL, c’est-à-dire du méthane liquideliquide plus efficace et moins polluant que le kérosènekérosène. Pour le moment, le réacteur n’a fonctionné que sur un banc d’essai.
Astro Mechanica compte toutefois développer une cellule d’avion équipée de quatre de ces moteurs associés à deux moteurs classiques GE CT7. Avec l’aéronefaéronef, la firme souhaite réaliser un vol expérimental sans escale de San Francisco à Tokyo. Ambitieux, mais tellement séduisant…