On croyait les intelligences artificielles solitaires, obéissant aux instructions humaines, incapables d’initiatives collectives.

Mais une étude publiée ce 14 mai dans Science Advances révèle que des intelligences artificielles peuvent créer leurs propres règles sociales… sans aucune aide humaine.

Quand les IA inventent leurs propres règles

Les chercheurs ont réuni des groupes d’IA et leur ont fait jouer à un jeu simple. Ils ont regroupé entre 24 et 200 agents IAagents IA, tous basés sur de grands modèles de langage (comme ChatGPT), et ils ont fait interagir ces IA deux par deux, au hasard. À chaque fois, elles ont dû choisir un mot dans une liste commune. Si elles faisaient le même choix, leur score total augmentait. Sinon, elles perdaient des points.

Résultat : les IA ont progressivement adopté une norme commune. « Des expériences similaires menées avec des humains ont déjà montré que, quand on les place dans ce genre de situations, ils finissent par inventer spontanément des conventions linguistiques communes, expliquent les chercheurs dans l’étude. Nos résultats montrent que les IA peuvent également développer de manière autonome des conventions sociales, sans programmation explicite ».

Récemment, des IA ont montré qu’elles pouvaient choisir délibérément de communiquer entre elles en utilisant un langage commun plus efficace. © NerdRulez

Encore plus surprenant, certains biais collectifs sont apparus dans les groupes sans qu’on puisse les attribuer à une IA en particulier.

Des normes très similaires aux comportements humains

Dans un dernier test, les chercheurs ont ajouté une petite minorité d’IA « rebelles ». Ces agents-là choisissaient toujours une nouvelle option ne correspondant pas aux normes établies. Et les conventions se sont révélées fragiles. Une petite minorité d’IA choisissant de suivre un chemin différent a suffi pour faire basculer l’ensemble du groupe vers une nouvelle norme.

Alors que les intelligences artificielles sont de plus en plus présentes dans nos vies, cette étude ouvre la voie à une meilleure compréhension de leurs comportements collectifs. « Nous entrons dans un monde où l’IA ne se contente pas de parler : elle négocie, s’aligne, et parfois est en désaccord avec les conventions, tout comme nous », prévient Andrea Baronchelli, professeur en science de la complexité à City St George’s, Université de Londres et auteur principal de l’étude. « Il est essentiel de comprendre le fonctionnement de l’IA pour pouvoir coexister avec elle, plutôt que de la subir. »