Des drones non identifiés survolent l’Europe : mais pourquoi ne sont-ils pas abattus ?

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Après les incursions de gros drones à l’aéroport de Copenhague (Danemark), puis d’autres survols à Oslo (Norvège), les intrusions se répètent. La nuit dernière, plusieurs engins non identifiés ont été repérés aux alentours, puis au-dessus des pistes de l’aéroport de Munich (Allemagne). Le trafic aérien a encore été suspendu à partir de 22 h 30 et 17 vols ont été annulés. Les semaines précédentes, d’autres drones ont également été repérés dans le nord de l’Allemagne.

Le magazine Der Spiegel liste des sites militaires, une centrale électrique, un hôpital universitaire, les usines du constructeur naval Thyssenkrupp, une raffinerie, le Parlement régional à Kiel et des ministères régionaux. Des cibles critiques ou stratégiques autrement dit.

Toujours dans la nuit du 2 au 3 octobre, c’est en Belgique qu’une quinzaine de drones ont survolé la base militaire d’Elsenborn. Il s’agit d’une zone d’entraînement située à la frontière allemande. Ironie de l’histoire, ces drones ont justement été observés alors qu’un exercice de détection de drones était en cours dans cet espace militaire. Ces engins ont ensuite été repérés de l’autre côté de la frontière, à Düren, par la police allemande. Dans tous les cas, le nombre exact de drones n’a pas vraiment été déterminé, ni leur provenance exacte. 

Il y a drone et drone

Alors évidemment, on ne parle pas des fameux drones suicides Shahed qui sont détectables au radar, mais d’engins plus petits que les radars primaires ne peuvent pas identifier. Malheureusement, faute d’identification formelle et d’image, le public ne peut pas faire la différence, ce qui engendre un climatclimat anxiogène. Et c’est sans doute le but recherché par ces opérations clandestines.

On sait que les drones qui ont survolé l’aéroport de Copenhague étaient à voilure fixe et plutôt imposants. En revanche, pour les dernières incursions, le scénario de petits drones quadrirotors ou de petits drones à voilure fixe semble être privilégié.

Déjà, le 27 septembre, dans la région de Kiel au nord de l’Allemagne, les observateurs avaient identifié un essaim de petits drones volants de manière coordonnée avec un « drone mère ». Avec un tel engin, un peu plus imposant – l’équivalent d’un Matrice 300 de DJI – il est possible d’embarquer une charge utile. Par exemple, il peut s’agir d’un relais de communication à longue portée pour faire naviguer un essaim de petits drones et relayer les données à l’opérateur distant. Ce type d’engin vole à basse altitude est n’est pas facile à détecter avec des radars ou en environnement urbain ou complexe.

Voici un Shahed suicide russe. C’est ce type de drone qui a survolé la Pologne. Les engins qui survolent l’Europe du Nord actuellement sont certainement beaucoup plus petits et surtout inoffensifs. © @Kyiv

Quel que soit le type de drone, dans tous les cas, étant donné la sophistication de ces opérations, c’est forcément une organisation étatique qui est à la manœuvre. Sans vraiment attribuer ces menaces, les pays concernés ont tendance à pointer du doigt la Russie et il faut dire que le timing coïncide bien avec les événements récents, comme les intrusions de drones en Pologne et en Roumanie, ou encore la pénétration de trois avions de chasse russes, dans l’espace aérien de l’Estonie.

Cela colle aussi parfaitement avec le virage à 180° de l’administration Trump, qui considère désormais que l’Ukraine pourrait l’emporter si l’Europe lui donne les moyens de le faire. Alors pour affaiblir les démocraties européennes, l’incursion de ces drones et l’incapacité qu’ont les États à les détecter, ou encore les intercepter, présente une belle opportunité.

Tout comme les autorités russes ont tendance à menacer l’Europe de frappes nucléaires régulièrement, l’objectif, consiste donc à faire peur. Pourquoi ? Pour que les populations se retournent contre leur gouvernement ou l’Union européenne pour arrêter le soutien à l’Ukraine.

Même avant l’invasion, Moscou était déjà coutumière de cette guerre, dite hybridehybride. Une guerre qui exploite les peurs ou cherche à exploiter les tensions sociales des démocraties. C’est d’autant plus inquiétant lorsqu’il s’agit d’aviation civile avec la peur d’une catastrophe. C’est également dommageable économiquement, car bloquer un aéroport coûte une fortune.

Ce type de fusil brouilleur permet de neutraliser un drone, mais les nouveaux modèles peuvent se passer de GPS. © Armée de Terre

Abattez-les !

Mais alors, pourquoi ces drones n’ont-ils pas été abattus ? La réaction semble faible, les autorités impuissantes. En réalité, ce ne l’est pas. D’abord, au niveau sécuritaire, les autorités réagissent très rapidement et sont capables de fermer un aéroport immédiatement et de gérer les vols en cours en sécurité. Ensuite, pour ce qui est d’abattre les drones, il y a des freins réglementaires et pratiques. Les pays européens sont équipés de ce qu’il faut pour neutraliser ces drones, mais comme nous l’expliquions, il y a drone et drone.

Étant donné leur taille imposante, abattre ceux de Copenhague aurait représenté un danger au sol qu’un pays ne peut se permettre. Avec des missilesmissiles, cela pourrait tourner en catastrophe. De même, abattre des drones au canon nécessite de tirer en l’airair des quantités de munitions colossales. Ce sont autant de munitions qui retombent avec dangerosité.

Comme les pays européens ne sont pas en guerre, personne n’est prêt à se risquer dans ce scénario qui pourrait engendrer des victimes civiles. Pour des drones plus petits, si leur portée n’est pas conséquente, ils sont difficiles à repérer. Contre eux, il existe des systèmes de brouillage pour les neutraliser ou des canons et fusils à impulsion électromagnétique. C’est ce qui a été mis place durant les JO par l’armée française. Mais encore faut-il que ces équipements se trouvent au bon endroit, au bon moment et en nombre suffisant. C’est pourquoi laisser évoluer ces drones et plus sûr pour le moment.

Plutôt que d’évoquer un « murmur de drones » ou un système antidrones qui prendra des années à être mis en place, peut-être que les gouvernements devraient mieux communiquer sur l’objectif réel de ces menaces et expliquer pourquoi il ne faut pas s’inquiéter outre mesure. Évidemment pour cela, l’idéal serait de savoir exactement de quels types de drones il s’agit en en capturant au moins un.

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