Des microalgues pour lutter contre le réchauffement climatique

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Les microalgues, par définition, sont invisibles à l’œil nu. Elles mesurent à peine quelques dizaines de micromètres. Moins que le diamètre d’un cheveu. Et certaines font parler d’elles parce qu’elles produisent des toxines.

Mais les microalgues ne produisent pas que des toxines. Loin de là, même. Sur quelque 40.000 espèces actuellement identifiées dans le monde, moins d’une centaine semble fabriquer des substances toxiques. Pour les hommes ou pour la biodiversité marine. « D’autres microalgues, elles, produisent des molécules qui peuvent être intéressantes – les protéines, des lipides, des pigments, etc. », nous explique Guillaume Charpy, le CEO de la start-up CarbonWorks. D’autant plus intéressantes que ces microalgues sont photosynthétiques. Comprenez qu’elles fabriquent ces molécules à partir de dioxyde de carbone (CO2). Un peu comme si la nature nous offrait là autant de machines à recycler le CO2 que nous émettons dans l’atmosphère.

Capter le CO2 et le valoriser grâce à des microalgues

Bien sûr, vous le savez, ce CO2, c’est un problème. Parce qu’il est le principal responsable du réchauffement climatique que nous vivons actuellement. Alors tous les moyens de l’éliminer, de le neutraliser, semblent bons à prendre. Y compris, compte tenu de l’urgence dans laquelle nous nous trouvons aujourd’hui. Dans le cas présent, le captage et la valorisation du CO2. Ce que les experts appellent le CCU – pour Carbon Capture and Utilisation.

« Dans la vraie vie, c’est un peu compliqué. Mais le concept en lui-même est simple, poursuit Guillaume Charpy. L’industrie a besoin de carbone. Et plutôt que de récupérer toujours plus de carbone fossile– en extrayant du pétrole, notamment –, nous lui proposons une autre ressource. »

Pour se développer, les microalgues de CarbonWorks ont besoin de CO2« Ce CO2, nous allons le chercher directement chez un industriel », nous précise Guillaume Charpy. Comment ? En reliant tout simplement un photobioréacteur – un bassin clos dans lequel poussent les algues en question – aux émissions de l’industriel… par un tuyau. « C’est la partie la plus simple, finalement. »

Il ne faut toutefois pas oublier que deux ingrédients majeurs interviennent dans la photosynthèse. Le CO2, nous venons de le voir. Mais aussi une dose d’énergie. De l’énergie sous forme de lumière. La lumière du soleil lorsque l’on parle de CCU extensif. Ici, l’objectif est de monter d’un cran. De faire du CCU intensif. « Pour que les rendements soient meilleurs que dans la nature – CarbonWorks vise tout de même 5.000 tonnes de biomasse par hectare et par an –, nous devons apporter de la lumière à nos microalgues », nous explique le CEO de CarbonWorks. D’où le terme « photo » dans le mot photobioréacteur.

Le saviez-vous ?

Les fumées qui sortent des usines ne sont pas toutes constituées de dioxyde de carbone (CO2) pur. « La plupart du temps, les contaminants contenus dans les émissions des industries ne posent pas de problèmes à la culture des microalgues, nous assure Guillaume Charpy, le CEO de CarbonWorks. Mais en fonction des molécules que l’on souhaite obtenir, il devient impératif de ne pas retrouver ces contaminants dans la production biosourcée. Pour l’heure, nous travaillons à partir de ressources en CO2 très pures. À l’avenir, il faudra prendre cette difficulté en compte. Mais elle ne devrait pas constituer un verrou. »

Voilà, tout est prêt. Les microalgues n’ont plus qu’à absorber le carbone (C) contenu dans le CO2 et à rejeter l’oxygène (O2) vers l’atmosphère. Tout est prêt ? Pas tout à fait encore. Car il faut aussi, un peu, nourrir les algues. Avec de l’azote, du phosphore et du potassium« Rien que du très classique pour des végétaux. »

Et puis, l’heure de la récolte arrive. En pratique, elle se fait en continu, « dès quelques jours après la première inoculation ». La molécule d’intérêt peut enfin être extraite. « À raison de quelques centaines à quelques milliers de tonnes. » Pour servir, si possible, à l’industriel qui a fourni le CO2 nécessaire à la fabriquer. « Mais n’importe quel autre industriel peut aussi en profiter. »

Doublement décarboner l’industrie

L’ambition de CarbonWorks, c’est finalement de doublement décarboner l’industrie. En captant le CO2 qu’elle émet, d’abord. Puis en fournissant aux industriels de la matière première biosourcée en remplacement de la matière première fossile qu’ils ont l’habitude d’exploiter. Le tout sans atteinte à la biodiversité, avec une faible consommation d’eau et une faible emprise au sol. Une emprise, qui plus est, sur des terrains industriels. Pas sur des terres agricoles. « Notre objectif est de capturer 10.000 tonnes de CO2 par hectare et par an. Sachant qu’une forêt séquestre entre 13 et 37 tonnes de CO2 par hectare et par an. Et qu’un champ de maïs, qui est considéré comme un bon piège à CO2, ne va pas au-delà de 20 tonnes par hectare et par an », chiffre pour nous Guillaume Charpy.

Pour l’heure, CarbonWorks dispose d’un démonstrateur. Il est installé à Cestas, en Gironde. Et il produit un fongicide. Des partenariats ont été conclus – ou sont en cours de discussion – pour la fourniture de matières premières aux secteurs de l’agriculture – l’alimentation humaine, mais aussi animale -, de la cosmétique, de la pharmacie et de la chimie« Jusqu’à fin 2023, nous allons encore faire des allers-retours entre des tests de briques technologiques nouvelles à de petites échelles et des tests à plus grande échelle. D’ici 2025, nous espérons pouvoir mettre en route notre premier module élémentaire de CCU intensif à partir de microalgues. »

« Pour l’heure, nous ne sommes pas encore à l’échelle industrielle », reconnaît Guillaume Charpy. Mais le CEO croit en son modèle économique. « Nous n’ambitionnons pas de devenir des spécialistes des fongicides ou des pigments. Nous sommes des spécialistes de cette technologie de rupture pour le CCU intensif. Des spécialistes des microalgues. Ce sont ces compétences-là, et seulement celles-là, que nous allons mettre au service de l’industrie. » Et comme la demande en matière première biosourcée est croissante et que la ressource en CO2 est, c’est le moins que l’on puisse en dire, pléthorique…

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